Monsieur le président,
En ma qualité de président fondateur d’une association pour
la défense des valeurs morales et familiales, dont je suis l’unique membre, je
tiens à signaler à votre vigilance les comportements scandaleux auxquels se
livrent de tristes individus dans le local que vous mettez à leur disposition.
Ce groupe de personnes des deux sexes, qui dissimule ses
activités sous l’innocente étiquette de « club
de bridge », s’y réunit plusieurs fois par semaine. Lorsque l’on passe
à proximité les bruits et dialogues qui en émanent ne laissent, hélas, aucun
doute sur la nature exacte de ce soi-disant « bridge ».
En voici quelques exemples parmi les plus évidents :
- Il n’est pas rare d’entendre une voix féminine
soupirer : « je viens de
prendre un bon coup », ou encore, sans la moindre pudeur ces manches sont vraiment tendues.
- Pire encore, certaines apostrophent leur partenaire en ces
termes sans équivoque : « J’ai
une toute petite ouverture, et toi tu pousses, tu pousses, et tu t’étonnes de
chuter ».
- Les hommes, que je ne peux pas appeler messieurs,
demandent parfois à leur partenaire de s’étaler
sur la table pour admirer leur ouverture ! On croit rêver !
- Dès lors, comment s’étonner que dans cette atmosphère de
perverse lubricité, certains n’hésitent pas à se vanter de leur belle longue,
ou d’entendre ce commentaire salace : « j’ai
préféré tirer un coup de sonde pour le cas où la dame serait sèche »
- On entend parfois parler cyniquement de passe, voire double passe ou de placement de main. On frémit en
imaginant la scène !.
- Le pire semble atteint lorsque un des participants fait un
« cue-bid », sans doute
une position acrobatique du Kama Soutra. Et quand on entend « c’est le top », on ne sait
plus que penser.
- Si encore, selon la formule chère aux animateurs dépravés
de réunions échangistes, cela se déroulait entre adultes avertis et
consentants ! Mais le comble de l’horreur est atteint quand certains
n’hésitent pas à clamer : « quelle
jouissance de posséder une belle mineure affranchie »
- On pourrait croire que les participants sont épuisés quand
on entend « passe..passe..passe »,
Erreur ! La fête continue, et l’on peut encore entendre des encouragements
scandaleux du genre : « merci
partenaire » ou « bravo partenaire ».
- Enfin ces inqualifiables orgies sont dirigées par une
sorte de maître de cérémonie qui orchestre les débats d’une voix lubrique, ordonnant périodiquement aux participants de
changer de position, précisant qu’ils doivent monter tout en sautant une paire !
Monsieur le Président, il n’est pas tolérable que se
poursuivent, dans un local du club, ces outrages répétés à la moralité
publique. Je vous remercie par avance de faire votre devoir, et vous prie
d’agréer mes anonymes salutations.